lundi 12 mars 2007

Enfumés par la loi sur le tabac

Panier du manager


A Orléans, comme partout ailleurs, la loi du 1er février 2007 relative à l'interdiction du tabac dans les entreprises et les lieux publics s'applique avec une souplesse qui dépend bien souvent de la position hiérarchique. Plus la fonction est élevée, plus on s'offre des libertés avec la loi, sans risque majeur de voir l'un de ses subordonnés porter plainte.
Certains représentants du personnel, comme ici, au siège des Parfums Christian-Dior de Saint-Jean-de-Braye (Loiret), ont très tôt senti le danger venir. Dès 2005, ils ont exigé et obtenu une modification substantielle du règlement intérieur de l'entreprise. «Il était question d'interdire le tabac dans les seuls bureaux collectifs, se souvient Didier Vela, délégué CGT et représentant du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Nous avons demandé que cette mesure juste soit étendue à tous les espaces. Qu'il n'y ait pas quelques privilégiés qui fument tranquillement dans leur bureau pendant que les autres se retrouvent au pied des bâtiments dans les courants d'air ou sous la pluie.» Résultat : l'entreprise s'est fendue d'un superbe Abribus doté de cendriers, et assure à tous les salariés qui le souhaitent la prise en charge totale des traitements médicamenteux pour arrêter la cigarette.
Cette position salutaire pourrait utilement inspirer les salariés de la région et leurs représentants. Ici, dans les couloirs de l'hôtel de région, règne une atmosphère étrange. D'un côté, les «exécutants de base», qui se retrouvent à «faire le trottoir» deux ou trois fois par jour. De l'autre, les spacieux bureaux des membres du cabinet, où la loi semble être une exception. «On se permet de fumer parce que ça ne gêne personne, explique l'un d'eux. Si quelqu'un fait une remarque, nous obtempérons.» Pour l'heure, aucun fumeur passif ne s'est risqué à contrarier son supérieur hiérarchique. Sans doute par crainte de «passer pour un chieur» , comme l'explique une secrétaire administrative.
Plus au sud, à proximité des bâtiments universitaires, le siège de Radio Campus. «Nous sommes une association, donc un espace de liberté , se défend Arnaud, président de la station. On ne va pas fliquer la centaine de bénévoles qui se croisent ici 24 heures sur 24.» Résultat : dès 19 heures, «le cône» ­ c'est le nom prédestiné du bâtiment ­ baigne dans un nuage de fumée.
Enfin, il y a ceux qui ne plaisantent pas avec la loi, comme dans cette brasserie de centre-ville. Les serveurs, qui côtoient toute la journée des clients clope au bec, doivent pointer avant de sortir en griller une. Consolation : cette mesure touche tout le monde, quel que soit son grade.